mercredi 14 mars 2007

Garde chargée

Première garde de nuit seule. Bilan : 7 accouchements dont 3 morts. Je prends la garde à 16H. A 16H10, je fais l'accouchement d'une dame dont je ne connais même pas le dossier. Le bébé est en état de mort apparente. Nous essayons en vain de le réanimer avec Cécile. Nous nous sentons démunies. J'enchaine pendant la nuit avec 4 accouchements physiologiques qui me remontent le moral. 5H50: une dame arrive sur un brancard : le siège du bébé est sorti, j'ai juste le temps d'enfiler une paire de gants pour terminer l'accouchement d'un bébé mort... Le moral retombe. 5 minutes après, une multipare se présente : c'est encore un siège mais décomplété. Elle est à complète, les BDC sont bons. 10 minutes après, accouchement. Les problèmes commencent. Je suis seule avec la dame, la sage femme est en train de finir une aspiration dans une autre pièce. Les fesses sortent puis plus rien. La femme pousse mais ça n'avance plus. Je sors les pieds, essaie de sortir le reste mais les épaules ne passent pas. Les images du TP manoeuvre défilent à toute vitesse. La sage femme arrive enfin. J'arrive difficilement à sortir l'épaule antérieure. Le temps presse. Autour de moi, pas d'aide à espèrer. Je sors le deuxième bras en me disant que cette fois c'est bon. Pas de chance, la tête reste coincée. Au bout de 2 minutes de manoeuvres infructueuses, le bébé sort enfin... Je n'ai plus de BDC. Je coupe le cordon est emmène directement le bébé sur la table de réa occupée par deux bébés que je pousse !! La sage femme part chercher l'aspiration restée dans la salle à côté. C'est en vain qu'on essaie de réanimer cette petite fille de 3500grs pendant près de 30 minutes. Moral à 0. La maman ne parle pas français. Personne ne lui annonce la mort. Elle me remercie. Je suis dégoutée. J'apporte l'ordonnance à la famille qui me demande des nouvelles. La maman est en vie c'est tout ce qui importe pour elle. Les remerciements de la famille sont terribles à supporter. Je me sens coupable. Je ressens cruellement mes limites et à ce qui se serait passé en France. La maman est enfin mise au courant mais continue à me remercier d'être en vie. C'est terrible. Je cède la place à Marie et Cécile à 8H. Le sommeil tarde à venir...

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Nous sommes boulversées par ton message, nous n'y connaissons rien en aide à l'accouchement, mais nous avons le sentiment que tu as fait tout ce que tu pouvais pour ces femmes et leur bébé. On pense très fort à toi, et on attend de tes nouvelles sur msn ou autre...
très très très très... gros bisous

Anonyme a dit…

Wow.... J'ai des frissons partout rien qu'à imaginer cette garde catastrophique ! Aucune comparaison possible à ce qui existe en France...
Je pense fort à vous toutes les filles, gardez courage ! je vous envoie de gros bisous de la France, tenez bon ! \(^x^)/

Anonyme a dit…

Salut les filles,
Je lis vos commentaires et je vois que c'est pas du tout drôle en Afrique. La veille du 8 mars j'ai lu la presse de mon pays le Burkina et la plupart des femmes révendiquaient de meilleures conditions d'accès au soins pour les femmes enceintes et les bébés.
Je suis contente pour vous qui avez décider de consacrer une partie de votre formation aux femmes de ce continent.
Puisse cette expérience vous rapporter quelque chose humainement, car après tout ça donne un sens à la vie.
Moi, je profite du soleil de Strasbourg en ce moment meme s'il fait encore froid.
Bisou à toutes.

Anonyme a dit…

J'ai oublié de signer le message précédent.
Agnès, amie de Marie.

Anonyme a dit…

salut les filles, je suis une copine à Cécile, même si je ne comprend pas tout, j'imagine la difficulté et je pense fort à vous! Gardez le morale surtout et dite vous que vous faite le maximum! Courage, bisous à vous toute et plus spécialement à Cécile!

Aurélie

Anonyme a dit…

Vos messages me donnent envie de pleurer de désillusions...juste de la bonne volonté, c'est tout ce qu'il faudrait.......

Courage, Camille, j'imagine ton malaise face à toutes les limites que tu as pu rencontrer lors de cet accouchement.

Anonyme a dit…

L'année dernière j'ai passé deux semaine dans cet hopital avec Sonia (EFS 4 à l'epoque). Il faut malheureusement ce faire a ce mode de fonctionnement, l'enfant avant un an de vie n'a pas d'importance. C'est triste à dire mais on s'y fait, c'est comme ca, c'est la fatalité.
Une femme a faillit mourrir durant une de nos garde, et la c'est diffentent, il faut tout faire pour lutter contre la fatalité, faire avec les moyens du bord mais tous faire, faire chier tout le monde pour la sauver. En partant de Saint louis, la femme avait quitté la réa sur ses 2 pieds.
C'est dur, on vit des choses particulières et incroyable ou bon nombre de sentiments se mélangent.
Mais c'est une expèrience inoubliable, qui va beaucoup vous apporter, et va vous permettre d'affronter les difficulté de la vie et des salles d'accouchement avec plus de Zen-attitude tellement sénégalaise, tout en gardant et améliorant l'éfficacité de votre apprentissage francais.